En mars 2003, Joan Radha Bridges se présenta dans le groupe internet de discussions  exSY  et fit le récit de comment elle fut agressée sexuellement par Swami Muktananda. 

MON HISTOIRE

Le dalaï-lama conseille aux chercheurs de vérifier avec soin  les qualifications d’un enseignant : «  La meilleure chose, a dit le dalaï-lama dans une interview en février dernier (2003), à chaque fois que se produisent une exploitation, un abus sexuel ou financier, est de les rendre publics. »

Il est temps pour moi d’apporter la lumière de la vérité sur des faits qui ont

été enfouis trop longtemps.

J’ai été dans l’équipe au service de Muktananda pendant 8 ans, à partir de 1974. J’avais 21 ans quand j’ai rejoint la tournée. Les événements dont je vais faire le récit ont eu lieu après environ 5 ans en tournée avec Baba. J’avais donc environ 26 ans, et Muktananda 73 ans.

La tournée s’est arrêtée à Miami où je suis allée en avance pour mettre en place la librairie. J’ai été surprise de constater que j’avais été mise dans une chambre au dernier étage à proximité de l’appartement de Muktananda.

Toutes les jeunes filles se trouvaient dans les chambres les plus proches de Muktananda et les filles plus âgées étaient plus éloignées. Nous méditions dans nos chambres tous les matins en écoutant Muktananda se promener dans le couloir. Personnellement, j’ai été témoin de jeunes filles entrant et sortant de l’appartement de Muktananda.

Après quelques mois de ce séjour, j’étais seule dans ma chambre quand

Muktananda entra, ferma la porte, m’empoigna et me fit un gros baiser sur

la bouche. J’étais à la fois ravie et confuse – je ne savais pas quoi en penser.

Peu de temps après, j’ai reçu par Malti une invitation pour venir à l’ashram de Boston avec un groupe restreint. C’était un privilège – j’étais ravie d’en faire partie.

A Boston, Baba parcourait les couloirs la nuit. Il m’arrivait de le heurter dans l’obscurité en allant aux toilettes. Il a continué à m’étreindre et m’embrasser. Je ne comprenais pas, mais me disait que Baba était Dieu, donc cela devait être

très spécial : cela devait être une bonne chose.

De retour à South-Fallsburg, je retrouvais ma seva habituelle à la librairie, sans privilège spécial ni contact avec Muktananda.

Puis, un soir, je rentrais de la librairie avec la caisse . Ce jour là, j’avais prié Muktananda pour m’aider à comprendre ma véritable voie – si j’étais destinée à avoir des enfants ou devenir Swami . Muktananda apparut dans le hall et me tira derrière un long rideau devant la porte de son appartement. Le rideau était aussi long que le hall et avait des trous dedans qu’on disait avoir été faits à la demande Muktananda. Les trous permettaient à Muktananda de regarder les gens sans qu’ils le sachent.

Quand je fut là derrière, il commença à me parler, surtout en Hindi avec quelques courtes phrases en anglais, « Chota, chota », qui signifie quelque chose comme « les petits », en montrant mon ventre. J’étais heureuse de cette orientation.

Puis il m’a choquée et surprise: il a saisi mes seins et les a tordus fermement, et a passé une main sous ma robe pour toucher mon vagin. Je ne savais pas quoi penser ou faire – j’étais abasourdie. Il m’a renvoyée avec une multitude de questions tournoyant dans ma tête : comment expliquer à moi-même les actions du Guru ?

Après tout, c’était le Guru, semblable à Dieu, alors pourquoi faisait-il cela ? Il nous avait dit d’être chastes, alors comment cela pouvait-il être sexuel ? Je n’avais pas de réponses.

La nuit suivante, de nouveau, il apparut et me fit signe de venir. A nouveau je n’ai pas mis en question ses instructions étant donné que j’étais abandonnée à

Muktananda, mon Guru ( l’abandon au Guru était un élément essentiel des chants du Siddha Yoga et des enseignements que je suivais ).

Muktananda m’emmena dans son appartement cette nuit et me fit m’allonger sur un grand fauteuil ottoman. Cette fois, il inspecta mon vagin. Il dit : « Good yoni. »

Muktananda m’a emmenée dans son appartement à nouveau la nuit suivante. Tout

le temps il m’a dit: « Ne le dis à personne » et « Ne le dis pas à ton mari. »

Muktananda m’a mise sur une table haute, a tiré mes jambes en arrière pour accéder à mon vagin et a sorti son pénis mou. Il a mis son pénis à l’intérieur de moi aussi loin qu’il pouvait et est resté dans cette position très longtemps.

Pendant ce temps, il disait des phrases telles que « Baba urevetta  » ( le sperme

va vers le haut ); « Baba Yogi ». Il répétait: « Pas de sexe, tantra , pas de sexe,

tantra »,  « longtemps ». (Il semblait me dire qu’il faisait ce tantra longtemps, bien que je me demandais ce qu’il y avait de si spécial à seulement rester là debout un long moment.)

Je sentais qu’il essayait de me convaincre et de me forcer à croire que

ce n’était pas du sexe. J’ai senti le doute et la détresse que j’avais enfouis depuis de nombreuses années. J’ai dû me répéter que, bien sûr, Baba faisait des actions justes, il était Dieu. Je devais être très spéciale et importante. J’ai décidé que je devais être loyale envers Baba. Et ainsi toutes ces années, j’ai gardé ce secret. Je suis restée calme, confuse et silencieuse.

Maintenant, j’ai 50 ans et je suis prête à faire face et partager la vérité de mon expérience avec Muktananda. Je veux être finalement libérée de ces événements pour pouvoir aller de l’avant dans ma vie sans ce fardeau.

En 1986, j’ai essayé de parler de mon expérience avec des gens que je

pensais pouvoir m’aider à comprendre. Une femme et moi avons reconnu mutuellement notre expérience, mais elle n’était pas capable d’en parler complètement. J’ai aussi acheté des livres sur le tantra et lu des articles. Mais je n’ai rien pu trouver qui décrive quelque chose qui ressemble à mon expérience avec Muktananda (en fait, j’ai appris que le véritable tantra est quelque chose d’entièrement différent de ce que j’avais expérimenté).

En 1994, longtemps après la mort de Muktananda, j’ai partagé mon expérience avec un ami proche qui avait deviné la vérité. Peu de temps après, une ancienne amie avec qui j’avais fait de la seva, maintenant assistante de Gurumayi, m’a appelée à la maison à Atlanta. Elle m’a interrogée sur ce que j’avais dit à mon ami à propos de cette expérience et me demanda de lui donner un compte rendu détaillé. C’était embarrassant, mais je sentais que j’allais enfin arriver à en parler avec une personne proche de Gurumayi. Quand j’ai terminé, elle m’a réprimandée en me disant « Baba ne t’a-t-il pas toujours dit “top secret” ? » Ce fut la fin de la conversation – aucune aide, aucune explication, juste le message fort de se taire.

En 2001, je préparais un pèlerinage en Inde. (Ce fut une intervention du Divin, mais ceci est une autre histoire). Avant de partir, je fis une tentative audacieuse pour communiquer avec Gurumayi sur mon expérience avec Baba, en lui écrivant une longue lettre pleine de sincérité. Il m’a fallu des semaines pour composer le texte, lui parlant de mon voyage et posant des questions au sujet de mon expérience avec Muktananda, espérant un peu de communication en retour. Je demandais clairement de l’aide. J’ai envoyé la lettre par l’intermédiaire d’un des proches assistants de Gurumayi que je connaissais bien et j’ai mis dedans un chèque important. Je n’ai jamais eu de réponse de Gurumayi ou de quelqu’un d’autre. Mon chèque a été encaissé.

Finalement, à 50 ans, par ma propre recherche, expérience et introspection, je ne peux plus nier que ce qui m’est arrivé avec Baba était mauvais.

Cette compréhension a été intensifiée par ma thérapie avec une professionnelle talentueuse qui est profondément spirituelle tant dans sa pratique que par sa formation. J’ai eu finalement le courage de partager avec elle ce qui m’était arrivé. Après avoir écouté ma description de toutes les actions de Baba, elle m’a demandé si, sachant ce que j’avais enduré, je voudrais prendre ma fille par la main et l’amener à expérimenter la même chose. La réponse fut catégoriquement non – absolument pas. A ce moment, j’ai clairement compris que Baba avait abusé de moi sexuellement.

J’ai une gratitude immense pour les éclaircissements que j’ai enfin reçus, après tant d’années de déni, de confusion et de chagrin. Il a été important pour moi de reconnaître cet abus et d’avancer. Cela a été un processus de guérison, mais je sais qu’il y en a beaucoup d’autres qui sont plus jeunes que moi et qui n’ont pas été capables d’examiner ce qui s’est passé pour elles. Mon espoir est

que, en racontant mon histoire et en soulevant enfin le voile du secret, alors d’autres aussi puissent trouver le moyen de guérir et aller de l’avant dans leur vie. Pour cette raison je ne reste plus dans l’anonymat. A cause de la peur, personne auparavant n’avait mis un nom à son histoire d’abus sexuels commis par Swami Muktananda. Mais je vais le faire pour qu’ainsi il ne puisse plus être dit que ces histoires sont inventées. Je suis ouverte aux commentaires et questions et tenterai d’y répondre et d’aider toute personne en ayant besoin.

J’invite également toute personne qui en aurait besoin à me parler en dehors du site par e-mail personnel.

Merci. Puissions-nous tous trouver la Vérité que nous recherchons.

Que Dieu vous bénisse.

Joan Radha Bridges